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Psychologie moderne : critique d’une discipline qui a pollué nos vies

Depuis plusieurs décennies, la psychologie moderne s’est imposée comme l’autorité incontestable pour définir ce qu’est une relation saine, une éducation réussie ou un couple équilibré. Les psychologues, psychopédagogues et thérapeutes ont progressivement remplacé les parents, les enseignants et les religieux comme sources de sagesse sur les questions fondamentales de la vie familiale. [1]

Cette transformation n’est ni neutre ni accidentelle. Elle s’inscrit dans un projet intellectuel et social qui a profondément modifié notre conception de l’être humain, du couple, de la famille et de l’éducation.

En s’arrogeant l’expertise de la vie intérieure et relationnelle, la psychologie moderne ne se contente pas de décrire le psychisme humain : elle redéfinit l’être humain selon une vision particulière du monde.

Pourtant, cette révolution silencieuse mérite d’être questionnée. Un nombre croissant de chercheurs, issus de différentes disciplines, remettent aujourd’hui en question les fondements mêmes de la psychologie moderne et ses impacts concrets sur la société.

Leurs travaux révèlent des biais structurels inquiétants : vision matérialiste de l’homme, parti pris systématique contre les parents et la famille, légitimation du divorce et de l’instabilité conjugale, promotion d’une éducation relativiste et construction d’outils pseudo-scientifiques comme « l’estime de soi » qui servent davantage une idéologie néolibérale que le bien-être réel des individus.

Cet article propose une cartographie de ces critiques académiques, en se focalisant sur trois domaines où l’impact de la psychologie a été particulièrement destructeur : le couple, la relation parents-enfants, et l’éducation. Il ne s’agit pas de nier l’apport de certaines thérapies ou approches psychologiques qui ont effectivement aidé des personnes en souffrance. Il s’agit plutôt de mettre en lumière comment, au niveau théorique et systémique, la psychologie moderne a participé à fragiliser les fondations qui assuraient autrefois la stabilité et la transmission au sein des sociétés.

Comment la psychologie a-t-elle légitimé la fragilisation du couple ?

Paul Vitz, psychologue américain à l’Université Divine Mercy, publiait en 1977 un ouvrage déterminant : La psychologie comme religion : le culte de l’adoration de soi (Psychology as Religion: The Cult of Self-Worship (Grand Rapids: Wm. B. Eerdmans Publishing Co., 1977)

Dans cette étude, Vitz met en lumière comment la psychologie humaniste a construit une théorie fondamentalement narcissique, valorisant l’épanouissement personnel au détriment de l’engagement conjugal. Sa critique dépasse largement quelques psychologues isolés : elle vise les courants dominants de la discipline, qui, depuis les années 1960, ont façonné notre culture et redéfini nos représentations du couple.

Le mariage conditionné à l’épanouissement individuel

Carl Rogers, l’une des figures les plus influentes de la psychologie humaniste, a théorisé une vision du mariage qui rompt radicalement avec la tradition. Pour lui, une relation entre un homme et une femme ne mérite d’être préservée que si elle procure une « expérience enrichissante et croissante pour chaque personne ». À première vue anodine, cette formule contient une révolution profonde : le mariage n’a plus de valeur en soi, il devient un instrument optionnel au service du développement personnel. Dès que celui-ci stagne ou décline, la séparation devient légitime, voire recommandée.

Michael A. Wallach et Lise Wallach, professeurs de psychologie à Duke University, ont analysé comment les théories psychologiques dominantes légitiment l’égoïsme et le divorce.[2] Leurs recherches révèlent que les psychologues, toutes écoles confondues, ont systématiquement pris le parti de l’individu contre le couple, valorisant chaque impulsion personnelle au détriment des valeurs d’engagement, de patience et de sacrifice qui sont pourtant le socle de toute relation durable.

Cette vision se manifeste concrètement dans les thérapies de couple. Vitz observe que la psychologie adopte une approche exclusivement individualiste : elle se focalise sur son client tout en négligeant systématiquement le conjoint et les enfants. Elle prend trop au sérieux les plaintes du client à l’égard de son couple sans avoir une vue d’ensemble impliquant les autres membres de la famille. Le résultat ? Un biais structurel qui favorise la séparation plutôt que la réparation, transformant la psychothérapie en un outil qui fragilise le lien conjugal au lieu de le soutenir.

La redéfinition narcissique de la fidélité

L’un des exemples les plus frappants de cette révolution psychologique est la redéfinition du concept de fidélité. Nena et George O’Neill, deux anthropologues américains, ont publié en 1972 le best-seller « Open Marriage. »[3], dans lequel ils proposent une vision radicalement nouvelle du mariage. Selon eux, la fidélité traditionnelle et la jalousie sont des anomalies psychologiques, des signes de « dépendance » et de « possessivité ».

La fidélité est alors réinterprétée. Elle n’est plus comprise comme un engagement envers l’autre mais comme une loyauté envers soi-même, « un engagement envers son développement personnel ». Dès lors, l’idée même de « rester fidèle » en vient à signifier, paradoxalement, la possibilité d’entretenir d’autres relations si celles-ci nourrissent sa propre évolution. L’infidélité, loin d’être une faute, se transforme alors en signe de sincérité envers son propre désir. Une inversion stupéfiante : la fidélité cesse d’unir, elle justifie désormais la rupture.

L’ironie est tragique : ce couple, qui prônait publiquement l’ouverture du mariage, finit lui-même par divorcer quelques années plus tard. Cette anecdote illustre une vérité plus générale : la culture de l’épanouissement personnel tend inévitablement à accroître le nombre de divorces et à réduire la longévité des unions parce qu’elle s’oppose aux exigences de l’engagement. Comme le souligne Vitz, chercher un engagement sans contrainte est une contradiction logique : c’est tenter de créer un carré rond.

Les conséquences du narcissisme conjugal

Cette vision psychologique du couple a produit des effets sociaux mesurables et dévastateurs. Aux États-Unis, le taux de divorce a connu une boom spectaculaire entre les années 1960 et 1980, précisément à l’époque où ces théories se diffusaient massivement dans la culture. Vitz n’hésite pas à qualifier le divorce de « forme de maltraitance » envers les enfants : l’obsession parentale de « réalisation de soi » s’est souvent payée au prix de l’équilibre affectif et de la sécurité intérieure de l’enfant.

Les valeurs d’indépendance et d’épanouissement personnel ne sont pas simplement des valeurs neutres parmi d’autres ; elles dirigent activement les choix et les sentiments de l’individu. Elles fragilisent sa capacité à s’engager dans le mariage et à y rester. Comme l’analysent Michael et Lise Wallach, elles installent une tension permanente : faut-il s’épanouir ou rester fidèle ? Poursuivre ses rêves ou accepter les contraintes du couple ? Rechercher l’indépendance ou apprendre à supporter la vie commune ?

Face à ces tensions, la psychologie moderne a systématiquement tranché : elle s’est rangée du côté de l’individu contre le couple, du désir contre le devoir, de l’épanouissement contre le sacrifice. Cette prise de position n’est pas neutre. Elle participe activement à la fragilisation des couples et à l’essor d’une culture de la solitude – où l’amour, désormais soumis à la logique du bien-être, peine à durer.

Pourquoi la psychologie accuse-t-elle systématiquement les parents ?

L’un des constats les plus troublants issus de la recherche critique sur la psychologie moderne est son parti pris systématique contre les parents et la famille. Ce biais ne relève pas de quelques praticiens isolés ou incompétents. Il est inscrit au cœur même des théories psychologiques dominantes, depuis Freud jusqu’aux courants contemporains.

Le complexe d’Œdipe : quand la théorie fait du père une figure du mal

La première grande théorie anti-familiale est celle du complexe d’Œdipe élaborée par Sigmund Freud. Selon cette théorie, tout enfant traverserait un conflit naturel et universel avec son père : une haine primitive intense, surgissant vers l’âge de quatre ans, qui constituerait l’expérience primaire dans la formation de toute personnalité masculine. « Tuer le père » symboliquement, en rejetant son autorité et en s’opposant à lui, devient alors l’évolution « normale » de l’enfant vers l’âge adulte.

Comme le souligne ironiquement Vitz, il n’est pourtant jamais très clair, chez Freud, ce que le père aurait fait pour mériter une telle haine. Apparemment, ses crimes sont d’être marié à la mère de l’enfant et d’être grand. Cette théorisation arbitraire d’un conflit familial inévitable a profondément marqué la culture occidentale du XXᵉ siècle, légitimant le rejet de l’autorité parentale comme un passage obligé vers la maturité.

L’évolution du bouc émissaire : de la mauvaise mère à la famille toxique

Avec le développement des écoles psychologiques post-freudiennes, la cible s’est élargie. La figure du coupable s’est déplacée : du père autoritaire, on est passé à la mère défaillante, puis à la famille tout entière. La mère est devenue le nouveau bouc émissaire, accusée tour à tour d’être dominatrice, castratrice, contrôlante, manipulatrice ou  émotionnellement dépendante.

Dans l’analyse transactionnelle, popularisée par Thomas Anthony Harris dans son best-seller « I’m OK – You’re OK »,[4] le père et la mère se fondent dans un état du moi unisexe appelé : le « Parent », figure symbolique de l’autorité, systématiquement présentée comme la source principale de nos blocages psychologiques.

Le schéma narratif de l’analyse transactionnelle est révélateur : l’Enfant est intrinsèquement bon, heureux et créatif mais il est accablé par le méchant Parent qui lui impose des frustrations et des limites. Pour se sauver, l’Enfant doit transgresser l’ordre du Parent et devenir lui-même Adulte.

Cette vision manichéenne a profondément modelé notre culture psychologique. Notamment les groupes de parole et les thérapies de développement personnel, où des personnes viennent raconter leurs problèmes « psychologiques ». Dans ces espaces, les participants découvrent tous que leur famille était en fait « dysfonctionnelle ». L’expression « famille dysfonctionnelle » est devenue si courante qu’une étude a révélé que 94% des familles américaines étaient désormais classées dans cette catégorie. La société entière s’est ainsi mise à croire que la guérison de soi passait d’abord par la mise en accusation de la famille.

Le mythe de l’enfant positif contre les parents négatifs

Au cœur de ces théories se loge un mythe puissant : celui d’un enfant naturellement bon et heureux, corrompu seulement par les influences extérieures, au premier rang desquelles figurent les parents. Cette vision ignore totalement la part négative qui existe naturellement chez tout enfant : la jalousie, l’égocentrisme, la possessivité, l’agressivité. En niant cette réalité anthropologique fondamentale, la psychologie moderne a construit un récit simpliste où les parents ne peuvent être que coupables désignés.

Vitz souligne le paradoxe troublant de cette position : ceux qui ne cessent de répéter l’importance de ne pas juger les autres n’hésitent pas à juger systématiquement les parents de façon négative. Les mêmes personnes qui se plaignent que leurs parents portaient trop de jugements portent elles-mêmes encore plus de jugements sur leurs parents. Cette contradiction révèle que le relativisme moral de la psychologie moderne s’arrête précisément là où commence l’autorité parentale.

Ce double discours révèle une contradiction profonde : la psychologie moderne, si prompte à prêcher la tolérance et la suspension du jugement propre à son relativisme moral, retrouve soudain un sens aigu du bien et du mal dès qu’il s’agit des parents.

Ainsi, le relativisme moral de la psychologie moderne s’efface dès qu’entre en scène l’autorité parentale : la tolérance cesse, le procès commence.

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Le sabotage de la légitimité parentale

Les conséquences de ces théories vont bien au-delà du cabinet du psychologue. Les « experts » – psychologues, psychopédagogues, psychiatres et psychothérapeutes – ont progressivement sapé la confiance en soi et la légitimité des parents à éduquer leurs enfants. Ce glissement a brisé le fil de la transmission entre générations : là où la sagesse familiale guidait autrefois l’éducation, elle est désormais remplacée par des prescriptions d’experts. Désormais, un parent qui souhaite éduquer son enfant selon les valeurs traditionnelles est suspecté d’incompétence et orienté vers un « expert » qui saura mieux que lui ce qui est bon pour son enfant.

Cette dynamique révèle un biais théorique profond. Comme l’analyse Vitz, les différentes écoles de psychologie sont problématiques non pas par manque de compétence ou de professionnalisme, mais au niveau même de leur architecture conceptuelle. Par construction théorique, elles reposent sur une prémisse biaisée et constante : l’enfant est naturellement bon, les parents sont mauvais par essence. Dans un tel cadre, les expériences positives quotidiennes que vivent les enfants – les gestes d’amour, les jeux, les voyages, les histoires, les moments de joie – sont systématiquement invisibilisées, tandis que les frustrations et les limites sont amplifiées et pathologisées.

Cette vision a des conséquences concrètes sur la vie quotidienne des familles. De nombreux parents témoignent d’un même malaise : un sentiment de culpabilité constant, presque chronique. Chaque difficulté rencontrée par leur enfant devient la preuve de leur incompétence parentale. Un enfant en échec scolaire ? C’est forcément que les parents n’ont pas su « valoriser son estime de soi ». Un adolescent en crise ? C’est nécessairement que les parents ont été trop autoritaires ou pas assez présents. Quelle que soit la situation, le verdict tombe toujours du même côté.

Cette culpabilisation systématique épuise les parents et les paralyse dans leur rôle éducatif. Le regard de la psychologie moderne, censé libérer, finit par asservir : il transforme l’amour parental en soupçon permanent.

Paradoxalement, pendant que la psychologie moderne détruit la légitimité parentale, elle refuse de reconnaître le rôle positif immense que jouent les parents au quotidien. Les efforts constants pour aider les enfants à partager, à coopérer, à respecter les autres, à développer leur empathie sont des témoignages de la capacité naturelle des parents à éduquer et de l’influence positive qu’ils exercent sur leurs enfants. Mais ces réalités quotidiennes ne correspondent pas au schéma théorique dominant, alors elles restent invisibles dans le discours psychologique.

Plus inquiétant encore, dans la pratique clinique, les parents sont jugés coupables sans être entendus. N’importe qui peut se présenter comme victime de ses parents ou de sa famille, et il aura toujours raison. Dans le droit, la justice offre à tout accusé le droit à la défense ; la psychologie, elle, condamne les parents par défaut. Ce climat de suspicion généralisée crée ce que Vitz nomme une véritable pollution sociale : une atmosphère où la gratitude filiale s’étiole, remplacée par le soupçon et le ressentiment.

Quelle alternative à la psychologie moderne ?

Face à ces constats accablants, faut-il rejeter toute forme de psychologie ou de thérapie ? Certainement pas. De nombreuses personnes ont été aidées par des approches psychologiques respectueuses de la dignité humaine, attentives à préserver les liens familiaux et sociaux. Le problème ne réside pas dans l’aide psychologique elle-même, mais dans les fondements théoriques matérialistes et individualistes qui sous-tendent la psychologie moderne dominante.

Les chercheurs critiques que nous avons cités ne proposent pas un retour nostalgique à un passé idéalisé. Ils invitent plutôt à une refondation de nos manières de penser l’être humain, le couple, la famille et l’éducation. Cette refondation passe par plusieurs principes fondamentaux.

Premièrement, reconnaître que l’être humain n’est pas qu’un amas de matière mû par des pulsions ou des désirs. Il possède une dimension transcendante qui le relie à des valeurs qui le dépassent : le bien, la vérité, la justice, la beauté. Cette dimension ne peut être réduite à un simple « sentiment » subjectif ou à une construction sociale arbitraire.

Deuxièmement, réhabiliter l’importance du collectif. La famille, la communauté, la société ne sont pas des contraintes oppressives : elles constituent le lieu premier de l’épanouissement humain. L’individu isolé, coupé de ses racines et de ses liens, n’est pas plus libre : il est simplement plus fragile et plus manipulable. Les valeurs de patience, de sacrifice, d’engagement et de fidélité ne sont pas des entraves à la liberté : ce sont les conditions de possibilité d’une vie pleine de sens.

Troisièmement, restaurer la légitimité de l’autorité parentale et enseignante. Les parents ne sont pas des incompétents à surveiller par des experts ou accompagnés par des coachs. Ils sont les premiers éducateurs de leurs enfants, porteurs d’une sagesse transmise de génération en génération. De même, les enseignants ne sont pas de simples « facilitateurs » qui accompagnent les élèves dans leur « exploration personnelle ». Ils sont des transmetteurs de savoirs, de valeurs et d’une culture commune qui transcende les préférences individuelles.

Quatrièmement, refuser le relativisme moral. Prétendre que toutes les valeurs se valent et que chacun doit définir le bien et le mal selon ses préférences personnelles impose, en réalité, une idéologie : celle de l’individualisme radical.  Cette position, loin d’être neutre ou libératrice, dissout tout sens commun et toute possibilité de vie ensemble.

Cinquièmement, replacer les problèmes individuels dans leur contexte social et politique. Un cadre d’entreprise stressé ou déprimé ne souffre pas d’abord d’un « manque d’estime de soi » ou de « pensées négatives ». Son mal-être s’inscrit dans ce qu’il a posé comme central dans sa vie (la « divinité » et le but ultime qu’il poursuit) et dans les conditions matérielles et sociales de sa vie. Psychologiser systématiquement les problèmes sociaux, c’est absoudre les responsables politiques et économiques de leurs responsabilités tout en culpabilisant les victimes.

Conclusion : Reprendre en main notre destin collectif

Depuis plusieurs décennies, la psychologie moderne influence profondément nos manières de vivre, d’aimer et d’élever nos enfants. Cette influence n’a rien de neutre. Comme l’ont montré Paul Vitz, Michael et Lise Wallach, Steven Ward, Kenzo Bergeron, Jean Twenge et bien d’autres, la psychologie dominante véhicule une vision de l’homme et de la société qui fragilise systématiquement les structures fondamentales : le mariage, le couple, la famille élargie, l’autorité parentale, l’éducation.

Cette fragilisation n’est pas un excès spécifique à certaines théories psychologiques, mais c’est plutôt le résultat d’une cohérence théorique profonde : la psychologie moderne est fille de la sécularisation, du matérialisme et de l’individualisme qui caractérisent la modernité occidentale. En faisant du Moi la source ultime de vérité et de valeur morale, en valorisant l’épanouissement personnel au détriment de l’engagement envers l’autre, en pathologisant toute forme d’autorité et de transmission, elle participe à la déconstruction méthodique des cadres qui donnaient autrefois sens et stabilité à l’existence humaine.

Les conséquences sont désormais visibles : explosion des divorces, généralisation du célibat et de la solitude, crise de l’autorité parentale et enseignante, génération narcissique et malheureuse, transfert des responsabilités collectives vers les individus. Ces phénomènes ne sont pas des accidents : ils sont les fruits prévisibles d’une vision du monde qui place l’individu isolé au centre de tout, au détriment des liens qui font la richesse et la résilience d’une société.

Heureusement, la prise de conscience progresse. De plus en plus de chercheurs, de praticiens et de citoyens remettent en question les croyances biaisées de la psychologie moderne. Ils redécouvrent l’importance de la morale, du collectif, de la transmission, de l’engagement, du sacrifice. Ils refusent de réduire l’être humain à un consommateur narcissique en quête perpétuelle de bien-être individuel. Ils comprennent que la vie bonne ne se trouve pas dans la fuite des contraintes mais dans l’acceptation joyeuse de nos responsabilités envers ceux qui nous entourent.

Cette refondation ne sera pas facile. Elle exige de résister à la pression culturelle immense qui nous pousse vers l’individualisme, le relativisme et le narcissisme. Elle demande de réapprendre des vertus oubliées : la patience, la fidélité, l’humilité, le service des autres. Elle suppose de réhabiliter des institutions dévaluées : la famille, l’école, les communautés religieuses, morales et politiques. Elle implique de restaurer la légitimité de l’autorité, non comme domination arbitraire, mais comme service du bien commun et transmission d’un héritage.

Le défi est immense, mais l’enjeu en vaut la peine. Il s’agit de sauver ce qui fait l’humanité de l’homme : sa capacité à s’engager librement au service d’une cause qui le dépasse, à aimer fidèlement envers et contre tout, à transmettre à la génération suivante ce qu’il a reçu de la précédente. Face à la psychologie moderne qui dissout tous les liens au nom de l’épanouissement personnel, il est temps de redécouvrir que notre véritable épanouissement réside précisément dans ces liens qui nous attachent à plus grand que nous.

Cette critique n’est pas un rejet de l’aide psychologique. C’est un appel à une psychologie refondée, qui placerait l’être humain dans sa totalité – corps, âme, esprit – au centre de la réflexion, qui reconnaîtrait l’importance vitale du couple et de la famille, qui restaurerait la légitimité de l’autorité parentale et enseignante, et qui refuserait de réduire les problèmes sociaux à des défaillances individuelles d’estime de soi. Une psychologie au service de l’humain, et non une psychologie qui dissout l’humain dans le culte du Moi.

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[1] Cet article est une analyse basée sur livre de Oudihat, Mohamed. Développement personnel : le grand Remplacement. Paris : Islam actuel, 2025.

[2] Michael A. Wallach et Lise Wallach, Psychology’s Sanction for Selfishness: The Error of Egoism in Theory and Therapy (San Francisco: Freeman, 1983).

[3] Nena O’Neill et George O’Neill, Open Marriage (New York: Evans, 1972).

[4] Thomas A. Harris, I’m OK – You’re OK (New York: Harper & Row, 1967).