Éthique de la violence : le Prince de Machiavel ou bien le Coran ?


Toute pensée politique se base sur une vision de l’homme, de ses tendances, capacités et limites et de la façon dont doit gérer le mal sur terre. La pensée politique occidentale s’est d’abord basée sur l’idée chrétienne d’un « Dieu qui a tellement aimé le monde qu’il s’est fait chair en la personne de Jésus, qu’il s’est sacrifié pour porter les péchés de l’humanité et la sauver ainsi du mal du péché originel et permanent dont la société souffre ». Face au mal qui circule dans la société, l’homme, à l’image de ce Jésus, doit « tendre l’autre joue », agir avec charité et amour. 

Cette idée, aussi belle soit elle, n’a pas démontré sa faisabilité dans l’histoire chrétienne. Bien au contraire, très tôt, les chrétiens vont ressentir son inefficacité. C’est ainsi que le christianisme – dans une version qui n’est plus l’enseignement initial du prophète Jésus (paix sur lui) – s’institutionnalise en Eglise qui exerce un magistère et un pouvoir grâce à son intégration en tant qu’instrument de l’empire romain. Désormais, « Jésus » s’associe à « César » pour disposer du pouvoir d’exercer la violence légitime. 

L’idée chrétienne de l’homme et de Jésus, parce qu’elle a manqué de réalisme, finit par s’associer à une logique d’empire pour continuer à exister. Croire que Jésus est Dieu et qu’il s’est sacrifié pour expier les péchés de l’humanité ne suffit pas pour réguler la violence et le mal sur terre. C’est pourquoi la pensée politique occidentale va passer de l’idée chrétienne à l’idée laïque d’un homme mauvais par nature, et que seul un Etat puissant qui a le monopole de la violence légitime va pouvoir réguler. C’est ainsi que naissent les idées d’Hobbes et de Machiavel par exemple. Face au mal et à la violence dont l’homme est capable en permanence, seul un Etat violent mais légitime peut garantir la paix de chacun avec chacun.

Dieu est le Créateur de tout ce qui existe. Il connaît parfaitement l’homme qu’Il a créé. Il lui a confié le dépôt de la liberté. Désormais, l’homme a le pouvoir d’agir librement de façon juste ou injuste, bonne ou mauvaise. Dieu offre dans le Coran une voie vers la sagesse qui part d’une vision réaliste de l’homme : ce dernier est capable de bien et de mal. Il l’invite à maîtriser la part de mal qui est en lui, à résister au mal qui est autour de lui et à exprimer tout le bien qui l’anime, à agir avec toutes les personnes désireuses de construire un monde plus juste.

S’engager sur la voie de la sagesse à laquelle le Coran nous invite, c’est accepter que le politique et que le recours à la violence soient inséparables de l’éthique, de la paix et de la justice qui en définissent la finalité et qui en régulent les moyens d’action. Sur ce point, la voie du Coran est proche de la philosophie politique grecque par exemple. 

Mais elle est en totale rupture avec l’approche moderne des « sciences politiques » qui se sont totalement autonomisées du sens de l’éthique, de la vertu et de la justice, pour développer le seul souci de la stratégie, de l’organisation et de l’efficacité de la guerre économique, politique et militaire. 

Machiavel illustre bien la modernité politique. Selon lui, le Prince doit s’intéresser à l’efficacité de son action sans se poser la question de la moralité. Mieux encore, la moralité n’est qu’un moyen politique pour paraître sous une image positive aux yeux des gens, pour les séduire et les tromper. Le Prince dispose d’autres moyens plus efficaces que la morale : la ruse et surtout l’usage de la violence pour atteindre son but : prendre, maintenir ou augmenter son pouvoir. 

La seule limite à l’usage de la violence n’est pas l’éthique mais la tactique : le Prince doit faire peur, soumettre par la violence la plus cruelle si nécessaire mais il ne doit pas se faire haïr. Il doit être craint sans se faire haïr. Il n’y a pas d’éthique dans l’usage de la violence mais un usage tactique de la violence. Cette tactique est bien résumée dans cette célèbre formule : « La fin justifie les moyens », bien qu’elle n’est pas de Machiavel. Il s’agit d’utiliser tous les moyens nécessaires pour atteindre son but : prendre, maintenir ou augmenter son pouvoir. Le mensonge, la dissimulation, la communication positive, l’exploitation des faiblesses de l’adversaire, les pièges, les opérations secrètes, les meurtres, voire les alliances avec la mafia et le terrorisme : aucune perversion, aucun crime ne doit faire reculer le Prince. Aucune considération morale ne doit le détourner de son but. L’efficacité, rien que l’efficacité : et au diable la justice. 

En effet, prendre, maintenir ou augmenter son pouvoir justifie tous les moyens. Ainsi, la raison d’Etat prime sur le respect de la morale :

Il est sans doute très louable aux princes d’être fidèles à leurs engagements ; mais parmi ceux de notre temps qu’on a vus faire de grandes choses, il en est peu qui se soient piqués de cette fidélité, et qui se soient fait un scrupule de tromper ceux qui reposaient en leur loyauté.1

En effet, pour lui, le Prince ne peut pas agir selon la vertu et la justice car il est souvent contraint, pour maintenir ou pour augmenter son pouvoir, d’agir contre sa parole, contre la bonté, contre l’humanité, contre la liberté, contre l’éthique. La pression des circonstances suspend la morale. Mais il faut savoir ce que l’on veut. Si l’on veut être prince, il faut s’attendre à devoir commettre des horreurs.2

Par exemple, si le Prince conquiert une nouvelle ville, il doit la détruire totalement pour éviter que les vaincus ne se relèvent et ne reprennent le pouvoir :

Celui qui devient maître d’une ville habituée à vivre libre et ne la détruit pas s’attende à être défait par elle ; car elle a toujours pour soutien, dans sa révolte, le nom de la liberté et ses anciennes institutions, qui ne s’oublient ni du fait du temps ni des bienfaits reçus (…) de sorte que la voie la plus sûre est de les détruire.3

Pour Machiavel, la paix est une illusion politique et la guerre est un moment normal et régulier dans la politique. 

A l’inverse, la voie à laquelle le Coran invite consiste à tout faire pour ne pas en arriver à la guerre. Tout d’abord, par la non-violence, en maîtrisant sa tentation de répondre à la violence de l’autre, tout en continuant à faire le bien autour de soi, en partageant une partie de sa richesse au profit de ceux qui en ont besoin, tout en cultivant le lien à Dieu par la prière qui offre l’occasion de se rappeler du sens de l’éthique, de la justice et de la limite :


Abstenez-vous de combattre, soyez constants dans la prière et donnez la zakah ! 

Coran 4 : 77
كُفُّوٓا۟ أَيْدِيَكُمْ وَأَقِيمُوا۟ ٱلصَّلَوٰةَ وَءَاتُوا۟ ٱلزَّكَوٰةَ

Ensuite, en continuant d’agir de façon juste, malgré la haine qui peut animer deux communautés humaines : 

Ô vous qui avez adhéré à la voie de Dieu ! Soyez droits devant Dieu, et témoignez selon la justice. Que la haine envers un peuple ne vous incite pas à vous montrer injustes. Soyez justes ! Vous vous rapprocherez ainsi de la piété. Craignez Dieu ! Dieu est parfaitement informé de ce que vous faites.

Coran 5 : 8
يَٰٓأَيُّهَا ٱلَّذِينَ ءَامَنُوا۟ كُونُوا۟ قَوَّٰمِينَ لِلَّهِ شُهَدَآءَ بِٱلْقِسْطِ ۖ وَلَا يَجْرِمَنَّكُمْ شَنَـَٔانُ قَوْمٍ عَلَىٰٓ أَلَّا تَعْدِلُوا۟ ۚ ٱعْدِلُوا۟ هُوَ أَقْرَبُ لِلتَّقْوَىٰ ۖ وَٱتَّقُوا۟ ٱللَّهَ ۚ إِنَّ ٱللَّهَ خَبِيرٌۢ بِمَا تَعْمَلُونَ

En effet, agir avec justice et même avec bonté est le meilleur moyen de ne pas tomber dans une escalade de violences :


Dieu ne vous défend pas d’être bons et justes envers ceux qui ne vous ont pas combattus à cause de votre religion et qui ne vous ont pas chassés de vos maisons. Car Dieu aime les justes. Dieu vous défend seulement de prendre pour alliés ceux qui vous ont combattus à cause de votre religion, chassés de vos maisons et qui ont aidé à votre expulsion. Et ceux qui les prennent pour alliés sont les injustes.

Coran 60 : 8-9
لَّا يَنْهَىٰكُمُ ٱللَّهُ عَنِ ٱلَّذِينَ لَمْ يُقَٰتِلُوكُمْ فِى ٱلدِّينِ وَلَمْ يُخْرِجُوكُم مِّن دِيَٰرِكُمْ أَن تَبَرُّوهُمْ وَتُقْسِطُوٓا۟ إِلَيْهِمْ ۚ إِنَّ ٱللَّهَ يُحِبُّ ٱلْمُقْسِطِينَ
إِنَّمَا يَنْهَىٰكُمُ ٱللَّهُ عَنِ ٱلَّذِينَ قَٰتَلُوكُمْ فِى ٱلدِّينِ وَأَخْرَجُوكُم مِّن دِيَٰرِكُمْ وَظَٰهَرُوا۟ عَلَىٰٓ إِخْرَاجِكُمْ أَن تَوَلَّوْهُمْ ۚ وَمَن يَتَوَلَّهُمْ فَأُو۟لَٰٓئِكَ هُمُ ٱلظَّٰلِمُونَ

Ensuite, en pardonnant :


Dis à ceux qui ont adhéré à la voie de Dieu de pardonner à ceux qui n’espèrent pas les jours de Dieu. C’est Dieu Lui-même qui les récompensera selon leurs actions. Celui qui fait le bien, le fait pour lui-même ; et celui qui agit mal, agit contre lui-même et en subira les conséquences. Et c’est à votre Seigneur que vous serez ramenés. 

Coran 45 : 14-15
قُل لِّلَّذِينَ آمَنُوا يَغْفِرُوا لِلَّذِينَ لَا يَرْجُونَ أَيَّامَ اللَّهِ لِيَجْزِيَ قَوْمًا بِمَا كَانُوا يَكْسِبُونَ
مَنْ عَمِلَ صَالِحًا فَلِنَفْسِهِ ۖ وَمَنْ أَسَاءَ فَعَلَيْهَا ۖ ثُمَّ إِلَىٰ رَبِّكُمْ تُرْجَعُونَ 

Enfin, en agissant pour maintenir ou pour reconstruire la paix. Nous ne devons pas suivre les traces du diable qui pousse à la haine, à la fabrication d’une image monstrueuse de l’autre, à la division et à la guerre de chacun contre tous : 


Ô vous qui avez adhéré à la voie de Dieu ! Entrez dans une paix totale (les uns avec les autres), et ne suivez pas les traces du diable, car il est certes pour vous un ennemi déclaré.

Coran 2 : 208
يَٰٓأَيُّهَا ٱلَّذِينَ ءَامَنُوا۟ ٱدْخُلُوا۟ فِى ٱلسِّلْمِ كَآفَّةً وَلَا تَتَّبِعُوا۟ خُطُوَٰتِ ٱلشَّيْطَٰنِ ۚ إِنَّهُۥ لَكُمْ عَدُوٌّ مُّبِينٌ

Le Coran offre à la famille humaine une voie universelle pour rendre le monde meilleur. La paix et la non-violence sont le principe premier qui doit être cultivé : s’abstenir de répondre à la violence par la violence ; continuer d’être bon et juste malgré les a priori négatifs ou la haine qui peut animer les uns et les autres ; pardonner pour sauver la paix, pour se donner la chance de rétablir la justice sans répandre le sang. C’est pourquoi Dieu encourage les communautés humaines à s’ouvrir les unes aux autres, à s’engager dans la connaissance mutuelle et à se surpasser dans le Bien :


Ô vous les gens ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle et vous avons répartis en peuples et en sociétés pour que vous vous connaissiez mutuellement. Le plus noble d’entre vous, au regard de Dieu, est le plus pieux/vertueux. Dieu sait et Il est bien informé (de ce que vous faites).

Coran 49 : 13
يَا أَيُّهَا النَّاسُ إِنَّا خَلَقْنَاكُم مِّن ذَكَرٍ وَأُنثَىٰ وَجَعَلْنَاكُمْ شُعُوبًا وَقَبَائِلَ لِتَعَارَفُوا ۚ إِنَّ أَكْرَمَكُمْ عِندَ اللَّهِ أَتْقَاكُمْ ۚ إِنَّ اللَّهَ عَلِيمٌ خَبِيرٌ

Comme le Coran est un Livre divin, il ne souffre pas de naïveté ou de manque de réalisme. Le Coran est idéaliste sans être naïf et il est réaliste sans être machiavélique. Le Coran invite la famille humaine à « craindre Dieu », c’est-à-dire à craindre de mal faire, de faire subir le mal et l’injustice autour de soi, même sans s’en rendre compte. Il l’invite à chercher à plaire à Dieu en mobilisant sa créativité et sa bienveillance pour trouver des moyens d’éviter la violence ou alors, à défaut, de recourir à la violence si et seulement si, cela ne produira pas un mal plus grand encore.

C’est pourquoi, après treize ans de persécution supportée par les musulmans dans la douleur, Dieu ordonne de se défendre :


(…) Annonce à ceux qui font le bien que Dieu prendra toujours la défense de ceux qui ont adhéré à sa voie, car Dieu n’aime pas les traîtres de mauvaise foi.

L’autorisation de se défendre est donnée aux victimes d’une agression, qui ont été injustement opprimées, et Dieu a tout pouvoir pour les secourir. Tel est le cas de ceux qui ont été injustement expulsés de leurs foyers uniquement pour avoir dit : ‘‘Dieu est notre Seigneur.’’ 

Si Dieu ne repoussait pas certains peuples par d’autres, des ermitages auraient été démolis, ainsi que des synagogues, des oratoires et des lieux de prières où le Nom de Dieu est souvent invoqué. Dieu soutiendra assurément ceux qui soutiennent Sa cause. Dieu est assurément Fort et Puissant.
Dieu prête assistance à ceux qui, s’Il leur donne la puissance sur terre, font la prière avec constance, donnent la zakah, ordonnent le bien et résistent au mal. En définitive, c’est à Dieu qu’appartient l’issue de toute chose.


Coran 22 : 37-41.
أُذِنَ لِلَّذِينَ يُقَٰتَلُونَ بِأَنَّهُمْ ظُلِمُوا۟ ۚ وَإِنَّ ٱللَّهَ عَلَىٰ نَصْرِهِمْ لَقَدِيرٌ ٱلَّذِينَ أُخْرِجُوا۟ مِن دِيَٰرِهِم بِغَيْرِ حَقٍّ إِلَّآ أَن يَقُولُوا۟ رَبُّنَا ٱللَّهُ ۗ وَلَوْلَا دَفْعُ ٱللَّهِ ٱلنَّاسَ بَعْضَهُم بِبَعْضٍ لَّهُدِّمَتْ صَوَٰمِعُ وَبِيَعٌ وَصَلَوَٰتٌ وَمَسَٰجِدُ يُذْكَرُ فِيهَا ٱسْمُ ٱللَّهِ كَثِيرًا ۗ وَلَيَنصُرَنَّ ٱللَّهُ مَن يَنصُرُهُۥٓ ۗ إِنَّ ٱللَّهَ لَقَوِىٌّ عَزِيزٌ
ٱلَّذِينَ إِن مَّكَّنَّٰهُمْ فِى ٱلْأَرْضِ أَقَامُوا۟ ٱلصَّلَوٰةَ وَءَاتَوُا۟ ٱلزَّكَوٰةَ وَأَمَرُوا۟ بِٱلْمَعْرُوفِ وَنَهَوْا۟ عَنِ ٱلْمُنكَرِ ۗ وَلِلَّهِ عَٰقِبَةُ ٱلْأُمُورِ

Et lorsque le prophète Muhammad (paix sur lui) reconquiert la Mecque dont il avait été chassé par ceux qui persécutaient injustement les musulmans, comme le prophète Joseph (paix sur lui), il pardonne à ses ennemis et leur accorde la liberté de refaire leur vie.

A l’inverse, pour Machiavel, la violence est un moyen efficace de prendre, de maintenir et d’augmenter son pouvoir. Il défend explicitement le crime d’Etat et la tactique du pompier pyromane : 

Un prince sage doit (…) nourrir astucieusement quelque inimitié contre lui afin que, l’ayant écrasée, il s’ensuive pour lui une grandeur plus haute.4

Comme la paix n’est qu’un passage précaire, une préparation de la guerre, il soutient que le bon Prince est un chef des armées et non pas un sage :

Un prince ne doit donc avoir d’autre objet ni d’autre pensée ni choisir d’autre chose quant à son métier, hors de la guerre, des institutions et de la discipline militaires ; car c’est le seul métier qui convienne à qui commande.5

A l’inverse, la voie à laquelle le Coran invite consiste à choisir un dirigeant sage-stratège qui a le sens de la vertu, de la paix et de la justice. D’ailleurs, le sujet principal qui occupe la formation du dirigeant, c’est l’éducation à la sagesse. Par exemple, Dieu fait de la conduite du prophète David (paix sur lui) un modèle à suivre. Car il dirige selon la sagesse et la justice. S’il recourt à la violence, c’est simplement pour stopper l’expansion de l’injustice : 

(…) David a tué Goliath, Dieu lui a donné la royauté et la sagesse, et Il lui a enseigné ce qu’Il a voulu. Si Dieu ne repoussait pas une partie des hommes par une autre, la terre serait certainement corrompue. Mais Dieu dispense Sa grâce sur les mondes. 

Coran 2 : 251
فَهَزَمُوهُم بِإِذْنِ ٱللَّهِ وَقَتَلَ دَاوُۥدُ جَالُوتَ وَءَاتَىٰهُ ٱللَّهُ ٱلْمُلْكَ وَٱلْحِكْمَةَ وَعَلَّمَهُۥ مِمَّا يَشَآءُ ۗ وَلَوْلَا دَفْعُ ٱللَّهِ ٱلنَّاسَ بَعْضَهُم بِبَعْضٍ لَّفَسَدَتِ ٱلْأَرْضُ وَلَٰكِنَّ ٱللَّهَ ذُو فَضْلٍ عَلَى ٱلْعَٰلَمِينَ

Quant au prophète Joseph (paix sur lui), il dirigeait à la lumière de la sagesse que Dieu lui avait enseignée :

Lorsqu’il eut atteint la maturité, Nous lui donnâmes la sagesse et la science. De cette façon Nous récompensons ceux qui font le bien.

Coran 12 : 22
وَلَمَّا بَلَغَ أَشُدَّهُۥٓ ءَاتَيْنَٰهُ حُكْمًا وَعِلْمًا ۚ وَكَذَٰلِكَ نَجْزِى ٱلْمُحْسِنِينَ

Quand il était ministre de l’économie, c’est encore avec sagesse que Joseph va administrer l’Egypte. Lorsqu’il retrouve ses frères qu’il avait perdu de vue, depuis qu’ils avaient tenté de le tuer durant son enfance, il n’agit pas à la façon de Machiavel, en tuant son ennemi maintenant qu’il est en position de force. Bien au contraire, il va leur pardonner et se détourner d’eux. 

Bref, l’enseignement de la sagesse est la formation commune à tous les prophètes et messagers que Dieu a envoyés à l’humanité pour la conduire vers la voie du plaisir innocent, de la vertu et de la justice. Il n’y a pas dans le Coran d’ « art de la guerre », de « stratégies » ou de « tactiques » enseignées pour vaincre, conquérir et garder le pouvoir. Le Coran porte plutôt notre attention sur l’art de pacifier, de fédérer, de réduire les conflits, de développer la connaissance mutuelle et d’orienter l’esprit de compétition vers la réalisation de l’idéal d’un Homme vertueux et d’une Cité juste. 

Le Coran montre la voie vers la civilisation de l’Homme où la violence n’est plus exercée de façon arbitraire mais devient un moyen cadré par l’éthique, que seule une autorité politique sage et légitime peut utiliser pour éviter un mal plus grand. 

Une question s’impose alors : pourquoi continue-t-on d’enseigner Machiavel dans les écoles de sciences politiques et de commerce, aux futurs dirigeants politiques et économiques ? Pourquoi ne propose-t-on pas plutôt la voie de la sagesse et de l’éthique même dans la guerre, que le Coran offre à tous ?

Pour aller plus loin

Erasme : L’éducation du prince chrétien. L’anti-Machiavel.

Al-Māwardī, De l’éthique du Prince et du gouvernement de l’État.

محمد رواس قلعجي أميرنا وأميرهم بين عمر بن الخطاب وميكافيللي

Notes

  1. Machiavel, Nicolas (1991), Le Prince, chapitre 18. Edition électronique.
  2. Machiavel, Nicolas (1991), Le Prince, chapitre 15. Edition électronique.
  3. Machiavel, Nicolas (1991), Le Prince, chapitre 3. Edition électronique.
  4. Machiavel, Nicolas (1991), Le Prince, chapitre 20. Edition électronique
  5. Machiavel, Nicolas (1991), Le Prince, chapitre 14. Edition électronique

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